Beaucoup de couples rêvent d’avoir un enfant. Malheureusement, tous n’y parviennent pas naturellement. Pour certains, il arrive que la solution nécessite d’utiliser l’ovocyte (l’ovule) d’une autre femme… Mais encore faut-il que ces couples disposent des ovocytes d’une donneuse.
En France, le don d’ovocytes reste en effet une pratique peu répandue. Que vous soyez donneuse, receveuse, ou tout simplement curieuse… voici comment ça se déroule !
Dans ce dossier :
> Le témoignage émouvant de Natacha, âgée de 30 ans, donneuse.
> A qui s’adresse le don d’ovocytes, et qui peut donner ?
> Comment se déroule un don d’ovocytes : les différentes étapes,
> Enfin, les conseils d’une gynécologue.
Don d’ovocytes : comment ça se passe ? : Le témoignage
Pourquoi avez-vous eu envie de pratiquer un don d’ovocytes ?
À 27 ans j’étais mama de 3 enfants, mais j’ai eu un peu de mal à avoir mon 2ème. Une fois que nous avons nos enfants, nous imaginons mal la vie sans eux. Lors d’un rendez-vous chez le pédiatre, j’ai vu un livre sur le don d’ovocytes. Une fois rentrée chez moi, j’ai appelé le centre Cecos le plus proche de chez moi (à 200 km !), et j’y ai pris un rendez-vous pour trois mois plus tard.
Pourquoi un délai si long ?
Parce que le centre étant loin de chez moi, je voulais regrouper tous mes rendez-vous le même jour. Cela m’a pris une matinée pour voir la psychologue, le gynécologue, l’anesthésiste et le biologiste.
Comment ça se passe ensuite ?
Il s’écoule quelques semaines avant un autre rendez-vous chez le gynécologue pour expliquer le protocole : l’arrêt de la pilule, les injections d’hormones pour stimuler les ovaires, les prises de sang. Ce délai est nécessaire pour avoir les résultats du caryotype et des tests comme l’hépatite ou le sida.
Le jour J, j’ai demandé une anesthésie locale et non générale pour pouvoir ressortir à midi. Le gynécologue m’a demandé de tousser et m’a fait plusieurs piqûres sur le col de l’utérus. Ensuite il a posé un speculum et a prélevé les ovocytes avec une canule qui aspire les ovocytes, dont il a rempli les flacons qui étaient déposés sur mon ventre.
C’était douloureux ?
Non pas vraiment. J’ai effectué ce don d’ovocytes à trois reprises. La première fois j’ai senti qu’il se passait quelque chose, mais la deuxième fois : aucune douleur. Seule la troisième fois a été un peu douloureuse. D’ailleurs à l’issu de chaque prélèvement, on me ramenait dans ma chambre sur un brancard, je me rhabillais, j’allais chercher mon ordonnance d’anti-douleur et je rentrais chez moi.
Ensuite, on est un peu ballonnée, on a un peu mal au ventre comme pour les règles, mais rien de terrible. La preuve, j’ai effectué un don d’ovocytes à trois reprises !
Que pouvez-vous dire aux mamans pour les encourager ?
Je dirais que le don d’ovocytes est très facile, et c’est un don à faire lorsqu’on a soi-même eu le bonheur d’être maman. En plus, après les dons, qu’est-ce qu’on se sent bien dans sa tête ! Donner un peu de soi pour permettre à des couples de connaître notre bonheur simple d’ être parents, c’est génial !
Il faut savoir que les injections, le traitement, les prises de sang peuvent se faire chez soi, et même les échographies de contrôle peuvent être faites par votre gynécologue habituel. J’ai parrainé une maman qui a bénéficié des ovocytes d’une donneuse deux mois plus tard. Son bébé vient de naître en mars dernier. Quel bonheur !
Et que déplorez-vous ?
L’entourage et le peu d’informations qui fait dire aux gens qu’ils ne comprennent pas que l’on donne un ovocyte. Ils ne savent pas que c’est seulement une cellule et non un bébé que l’on donne.
Par ailleurs, j’aimerais aussi demander que le statut de la donneuse soit officiellement reconnu. Car nous devons avancer tous les frais médicaux, quant au déplacement au Cecos le plus proche, qui peut-être à quelques centaines de km, c’est de notre poche. Peut-être faudrait-il améliorer ces points pour encourager les femmes à effectuer des dons d’ovocytes.
Don d’ovocytes : comment ça se passe ? : Pour qui, pourquoi ?
Dans le langage quotidien et pour simplifier, vous entendrez souvent ovocyte ou ovule, et spermatozoïde. Il y a deux types de cellules sexuelles que l’on nomme aussi gamètes. Le spermatozoïde est le gamète mâle, et l’ovocyte ou l’ovule est le gamète femelle, produit par les ovaires.
Tant qu’il n’a pas été fécondé, on parle d’ovocyte ou ovule. À partir du moment où il a été fécondé, cet œuf, composé d’un ovule et d’un spermatozoïde, commence à se diviser, on parle d’embryon.
Pourquoi un don d’ovocytes ?
Parce qu’il arrive qu’une femme ne puisse produire ou utiliser ses propres ovocytes. Dans ce cas, cette femme peut bénéficier des ovocytes d’une autre femme : c’est le don d’ovocytes.
Les raisons pour lesquelles des femmes peuvent faire appel à une donneuse, sont nombreuses :
- Pour des raisons génétiques ou thérapeutiques, une femme peut ne pas ou plus avoir d’ovocytes, et être en situation d’insuffisance ovarienne prématurée,
- Une femme peut avoir des ovocytes qui n’arrivent pas à maturation,
- Une femme peut avoir des ovocytes qui présentent des anomalies empêchant le développement embryonnaire,
- Une femme peut souffrir d’une maladie génétique qui a provoqué de nombreuses fausses couches ou des avortements thérapeutiques,
- Une patiente qui a subi un traitement de chimithérapie ou de radiothérapie qui atteint les ovaires, provoquant une baisse du volume ovarien, avec atteinte des ovocytes.
- Les ovocytes sont également destinés à des couples risquant de transmettre une maladie génétique grave à l’enfant.
Qui peut donner des ovocytes ?
La première condition est d’être une femme en âge de procréer et en bonne santé. Il faut être majeure et responsable. L’âge maximum est de 37 ans. Vous pourrez – si vous le souhaitez – avoir un ou plusieurs enfants, après un don d’ovocytes.
Aujourd’hui, pour les femmes n’ayant pas eu d’enfant, la possibilité du don est mentionnée dans la loi votée en juillet 2011 et en attente du décret d’application.
Don d’ovocytes : comment ça se passe ? : Comment donner ses ovocytes ?
Il faut s’adresser à un centre habilité à recevoir les donneuses. Il en existe 25 en France, dont vous trouverez la liste ici : www.dondovocytes.fr ou www.gedo.org/adresses.asp. Toute femme âgée de 18 à 37 ans qui est en bonne santé peut donner des ovocytes.
Le don d’ovocotyes se déroule en trois étapes :
1ère étape : le rendez-vous d’information
Pendant ce premier un rendez-vous d’information on vous explique la procédure, les différents traitements, les inconvénients et les contraintes de la démarche, le consentement écrit qu’il vous faudra signer. Si vous êtes en couple, ce consentement devra être signé par vous, mais aussi par l’autre membre du couple.
Un bilan de santé vous sera prescrit. Vos antécédents médicaux personnels, familiaux, les résultats de votre bilan seront évalués afin d’éliminer toute contre-indication au don d’ovocytes.
Vous aurez un entretien avec un psychologue ou un psychiatre afin de faire un point sur ce don. Si votre compagnon le souhaite, il pourra également avoir un entretien. Cet entretien est renouvelable autant de fois que vous le souhaitez, tout au long de la procédure.
Dès que vous entrerez dans le processus de don d’ovocytes, on vous conseillera au sujet de votre contraception. De façon habituelle, durant le cycle où vous souhaitez effectuer ce don, on vous demandera d’arrêter la prise éventuelle de pilule. Dans ce cas, le préservatif devra être absolument utilisé quelques jours avant le prélèvement des ovocytes. Le préservatif est en effet le moyen le plus approprié de contraception les jours qui précèdent le prélèvement ovocytaire. Si vous avez un stérilet non hormonal, celui-ci peut être conservé.
2ème étape : La stimulation des ovaires
La phase de stimulation ovarienne dure un peu moins de deux semaines. Cette phase consiste en l’administration d’hormones (par injections) qui aboutissent à la maturation de plusieurs ovocytes. Ces injections qui se font une fois par jour, sous la peau, peuvent s’effectuer à domicile, par vous-même, par un proche ou par un(e) infirmier(e).
Plusieurs prises de sang et/ou échographies permettront au médecin d’analyser les effets du traitement sur vos ovaires, et donc d’adapter ces traitements. Une dernière injection permet de débuter le processus de l’ovulation en vue de libérer quelques ovocytes.
3ème étape : Le prélèvement d’un ou de plusieurs ovocytes
Une journée et demie après la dernière injection, vous devez vous rendre à l’hôpital pour cette intervention qui se fait par voie vaginale avec anesthésie locale ou générale de courte durée. L’hospitalisation dure en moyenne une demi-journée et vous pourrez quitter l’hôpital en étant accompagnée.
Est-ce douloureux ?
En fin de stimulation, vous pouvez ressentir des ballonnements. Après le prélèvement, vous pouvez avoir un peu mal au ventre, dans la région du bassin, et avoir même quelques légers saignements. Ils disparaîtront très vite.
Exceptionnellement, une réponse trop importante de vos ovaires peut entraîner une prise de poids, des troubles digestifs, peut-être même une gêne respiratoire. Dans ce cas, rendez vous immédiatement aux urgences de l’hôpital.
Don d’ovocytes : comment ça se passe ? : Du côté receveuse
Vous ne saurez pas à qui profite votre don… mais certainement à une femme, à un couple qui en a besoin ! En France, le don d’ovocytes, pratiqué depuis 1984, est soumis à la même législation que le don d’organes. Il est encadré par la loi bioéthique de 2013. Les dons d’éléments et produits du corps humain sont liés à la gratuité et au bénévolat.
Le don est anonyme. Les donneurs et receveurs ne se connaissent pas. Vous ne connaîtrez pas le nom du ou des couples qui recevront vos ovocytes. En fait, vous ne saurez pas le nombre d’ovocytes qui ont été prélevés. Vous n’aurez pas non plus d’information sur les résultats du don.
Dans la mesure du possible, l’attribution des gamètes tient compte des caractères physiques principaux des donneurs et du couple receveur (couleur de peau, yeux et cheveux, taille, corpulence, morphologie…) et du groupe sanguin.
Don d’ovocytes : comment ça se passe ? : L’avis du spécialiste
Quelques jours avant le prélèvement des ovocytes, un traitement hormonal est effectué provoquant une stimulation ovarienne. Quels en sont les risques potentiels à court et moyen terme ?
À court terme, il peut y avoir une réponse importante de l’ovaire, une petite prise de poids liée à une rétention d’eau qui sera perdue lors des règles suivantes, des ballonnements, peut-être quelques saignements modérés au point de ponction, et des risques faibles inhérents à toute intervention médico-chirurgicale. Pour les éviter, les équipes sont formées, surveillent la stimulation ovarienne pour adapter le traitement, et travaillent dans des conditions d’asepsie propre à toute chirurgie.
Il n’y a pas de risque reconnu à moyen ou à long terme.
Combien d’ovocytes peut-on donner sur une vie entière ?
En raison d’une certaine pénibilité de la démarche, on ne le recommande pas plus de deux ou trois fois dans une vie. Il faut compter un minimum de trois à quatre mois entre deux stimulations ovariennes.
Que pouvez-vous dire aux femmes pour les inciter à donner leurs ovocytes ?
C’est une souffrance insondable pour ces femmes qui viennent à notre consultation et qui ne parviennent pas à être mères. Cette souffrance s’associe à un sentiment d’atteinte d’un projet de vie, et de profonde injustice. Les donneuses d’ovocytes aident ces couples à réaliser leur désir et leur projet de devenir parent.
Que pensez-vous des pratiques qui se font à l’étranger, où partent de nombreuses femmes Françaises pour effectuer un don d’ovocytes, accompagnées d’un couple pour être traité ?
Le problème majeur est celui d’une situation inégale entre l’offre et la demande. Ceci peut être en partie résolu en améliorant la diffusion de l’information sur les dons.
Par ailleurs, nous souffrons d’un manque de moyens humains et matériels pour assurer une prise en charge à la hauteur de la demande. Aussi, les délais d’attente peuvent être longs pour celles et ceux qui veulent avoir un bébé. Partir à l’étranger est de ce fait envisagé logiquement par des couples, ce qui objective une certaine situation d’inégalité de l’accès aux soins, et des dérives évitées en France peuvent émerger.
Vous pouvez donner un exemple sur ces dérives ?
Des cliniques étrangères font du démarchage au niveau des centres français et certaines offrent même une possibilité de rétrocession d’honoraires si ces derniers leur adressent des patients ! On parle de dons altruistes dans certains pays, mais que penser de la motivation de femmes qui donnent six fois en six mois moyennant des indemnisations ?
Ces dérives qui font croire que tout peut s’acheter doivent cesser car elles sont contraire à l’éthique du don, et à la dignité du corps et de la personne humaine.